M : Alors Demi, dis-nous en un peu plus sur toi.

J’ai 22 ans et je suis très passionnée par mon métier. Je suis quelqu’un de très sensible, j’adore voyager, découvrir de nouveaux pays et faire du shopping. Je n’ai aucune confiance en moi et je demande souvent aux personnes qui m’entourent si je fais bien.

M : Si tu devais te décrire en 3 mots ?

Je n’aime pas trop faire cela mais je dirais sensible, passionnée et souriante.

M : Quel est ton parcours scolaire?

J’ai réalisé mon cursus primaire dans la commune de Farciennes, ensuite je suis allée au collège à Auvelais où j’ai fait toutes mes secondaires avec comme options : langues et théâtre. En sortant des secondaires, j’ai commencé des études de langues germaniques, cependant je ne me sentais pas du tout à l’aise avec un public adolescent donc j’ai décidé d’arrêter.

Sans grande conviction, je me suis dirigée vers la HEAJ au département pédagogique. Beaucoup de personnes m’avaient déjà conseillé de reprendre des études d’institutrice maternelle. Je me souviendrai toujours de mon premier cours, c’était le cours de français avec madame Derydt, en sortant de là, j’ai su que j’étais faite pour ça ! Je n’ai plus jamais quitté la Haute École et j’ai été diplômée en juin 2017.

M : Qu’est-ce qui t’a le plus marquée à l’école?

Je pense que c’est la disponibilité des professeurs. Je suis une personne très stressée qui a besoin d’être rassurée pour pouvoir avoir confiance en moi et pendant les 3 années où j’ai été là-bas les professeurs l’ont très vite remarqué et m’ont aidée tout au long de mon cursus.

M : Un professeur t’a spécialement marquée? Pourquoi?

Je vais parler dans un premier temps de Fabienne Scaillet. Elle m’a permis de grandir. C’est elle qui m’a poussée à partir à Cadix et c’est grâce à elle que j’ai pu évoluer dans mes apprentissages tant scolaires qu’humains. Elle est passionnée par son métier. À travers celui-ci et à travers ses paroles, elle vous fait part de sa passion. C’est aussi quelqu’un qui est là pour vous secouer quand vous avez envie de tout arrêter. Elle sait déceler les petites choses qui ne vont pas, nous les expliquer et nous permettre d’avancer en les corrigeant sans que cela soit négatif. Je pense que sans elle, je ne serais jamais partie à Cadix. Je lui dois beaucoup, elle a été présente pour moi durant ma dernière année de formation et l’est encore maintenant. Je dois dire que le cliché de la barrière entre le prof et l’élève en supérieur n’est pas du tout présent à la Haute École Albert Jacquard.

Ensuite je parlerai de Ludivine Brocca. Madame Brocca est quelqu’un qui, de prime abord, peut paraitre froid mais une fois que vous la connaissez un peu mieux ne l’est pas du tout. Si on a envie d’avancer, elle nous aidera. C’est elle qui m’a donné confiance en moi car elle arrivait à me faire voir toutes les choses positives que je faisais. Durant mon premier débriefing de stage, je me souviens avoir été dure avec moi-même, ce qui n’était pas vraiment juste selon elle. Au fur et à mesure des visites et des stages, j’ai réussi à avoir un esprit critique beaucoup plus développé, j’ai réussi à voir le positif dans ce que je faisais. À partir de ce moment-là, les rapports entre elle et moi ont totalement changé, je ne la voyais plus du tout en tant que pédagogue mais en tant que « collègue », qui venait me voir lors d’une activité et à qui je pouvais expliquer le pourquoi et le comment je faisais ces choses-là.

M : Quelles sont les difficultés auxquelles tu as été confrontée durant tes études et après?

Je pense que les plus grosses difficultés ont été le manque de confiance en moi et le stress. Ces derniers ont été, tout au long de ma scolarité, des freins. Heureusement, comme je l’ai dit plus tôt les professeurs ont toujours été là pour me secouer et me prouver le contraire. C’est grâce à eux, vraiment, si j’y suis arrivée et qu’aujourd’hui j’arrive, plus ou moins, à voir le positif de ce que je fais.

M : Dirais-tu que la HEAJ t’a bien préparée au marché du travail?

En ce qui concerne les préparations, la gestion de classe oui. Durant les 3 ans de formation et avec les stages, on a eu assez de préparation, même si au final, on n’en a jamais assez. Par contre, ce à quoi nous ne sommes pas préparés, c’est la méchanceté des personnes dans le monde de l’enseignement. Ça c’est vraiment horrible.

M : Où travailles-tu actuellement? Que fais-tu au quotidien?

Je suis enseignante à Farciennes, à l’école Waloupi. Pour ma première année, j’ai enseigné en troisième maternelle donc de mars à juin j’ai eu un temps plein et j’ai recommencé en octobre avec de la psychomotricité et quelques heures dans une classe en aide. En dehors de l’école, j’adore faire de la couture, je fais énormément de shopping, j’adore voir mes copines, faire plein d’activités mais je dois quand même énormément travailler pour l’école après mes journées et pendant les week-end.

M : Est-ce que ton métier te plait? Quels sont ses atouts selon toi?

Mon métier me passionne. Le métier d’enseignant doit vraiment partir d’une passion. Ne pas être passionné et aller faire ce métier, qui tous les jours vous demande du boulot, je n’y crois pas. Vous êtes toujours en recherche. Par exemple ici ce sont les vacances mais c’est impossible pour moi de déconnecter complétement et de ne rien faire pour l’école.

J’adore arriver le matin et travailler avec les enfants. Le plus important pour moi c’est qu’ils aiment ce que je prépare et s’ils n’ont pas envie de faire ce que j’ai préparé et qu’ils ont, par exemple, d’autres demandes, je n’hésite pas du tout à modifier mon travail parce que je pense qu’avant tout, c’est à eux que ça doit plaire. Si eux ne sont pas motivés, alors ça ne sert à rien d’avancer parce que si eux n’ont pas envie, tout ce que vous entreprendrez sera négatif.

En ce qui concerne mes atouts : ma capacité d’adaptation dans mon travail. Aujourd’hui j’arrive à gérer et corriger mes erreurs. Quand je fais une erreur devant les enfants je n’hésite pas à leur expliquer pourquoi j’ai fait cette erreur et comme ça, ça peut leur montrer que, nous aussi, en tant qu’adulte et en tant que référent on peut se tromper.

M : Utilises-tu ton expérience en Andalousie dans ton travail ?

Oui pour l’adaptation. Pour le reste non car les enfants n’apprennent pas une autre langue déjà et ensuite, en Andalousie, les professeurs utilisent une pédagogie frontale et ce n’est pas interdit mais ce n’est pas du tout conseillé, ce n’est pas du tout dans notre pédagogie en Belgique de travailler comme ça. Je dirais qu’en Belgique, on travaille plus en atelier où les enfants doivent plus gérer leur planning grâce à un tableau etc. Nous, on leur apprend vraiment à être autonomes tandis qu’en Andalousie, les enfants ont des manuels, ils sont coincés derrière leur table or ils n’ont que 4 ans, 5 ans, 6 ans. Donc voilà, moi je ne prône pas cette pédagogie. Je prône la pédagogie des ateliers où les enfants vont devenir autonomes en 1ère primaire.

M : Comment te vois-tu dans 10 ans ?

À vrai dire j’espère avoir travaillé avec une pédagogie différente de type Alvarès ou Montesorri. J’espère également avoir franchi le pas de partir au moins un an à l’étranger pour enseigner. C’est peut-être utopique mais j’ai vraiment envie de pouvoir évoluer dans mon métier, de ne pas rester dans ma classe chaque année, à vouloir essayer de faire des thèmes différents et de peut-être passer à côté de beaucoup de nouvelles techniques. Mon rêve, c’est vraiment de pouvoir évoluer, voyager, repérer de nouvelles pédagogies, des choses que les enseignants font dans d’autres pays et que je pourrai remettre dans ma classe un jour.

M : Un conseil pour les étudiants actuels?

Dans un premier temps, je leur dirais qu’il faut qu’ils s’accrochent, que les cours à la Haute Ecole ne sont pas difficiles mais que ce sont les stages qui demandent le plus de travail, de préparation, de rigueur et surtout d’envie. Il ne faut pas baisser les bras. Je sais que c’est vraiment compliqué, que c’est une période où l’on doit travailler sans cesse, où les maitres de stage peuvent nous rajouter des prépas à quelques jours du début du stage. Mais voilà, on peut avoir un moment de stress, un moment où on a envie de se dire qu’on va tout arrêter, qu’on ne va pas aller en stage et puis finalement on arrive le premier jour et on est motivé par les enfants et on a vraiment envie d’avancer. Je pense qu’à la Haute Ecole, il y a suffisamment de belles personnes pour vous épauler et pour vous encourager. N’oubliez pas que les stages permettent d’acquérir de l’expérience donc c’est super important ! Et si vous vous trompez en stage, durant une leçon, il faut que vous analysiez pourquoi et puissiez en tirer des enseignements. Aujourd’hui, j’aurais plutôt tendance à dire que je préfère me tromper et apprendre de mes erreurs plutôt que d’essayer de tout faire au mieux et de ne pas le faire très bien.

Un autre conseil, c’est vraiment l’entraide. Aidez-vous entre vous, donnez-vous des idées de leçons, construisez des outils qui vont vous permettre, après l’école, quand vous enseignerez, de vous aider. Le monde dans lequel je vis depuis un an est vraiment un monde où les gens sont vite jaloux de votre boulot, où c’est vraiment compliqué parfois de partager. Ce n’est pas une généralité parce qu’il y a vraiment des enseignants qui sont motivés et qui ont envie de partager avec vous mais vous rencontrerez des professeurs qui sont vite jaloux et qui ne vont pas partager parce que, peut-être, ils croiront que vous faites mieux qu’eux… or nous faisons tous le même boulot.

Pour terminer, le plus gros conseil que je peux vous donner c’est de profiter de chaque instant parce que les années à la Haute École passent très vite ! Il y a énormément de travail, je le conçois mais franchement profitez de chaque instant. Personnellement, mes années à la Haute École resteront à jamais gravées !

M : Ton souvenir le plus marquant à la HEAJ?

Sans hésiter mon stage à l’étranger. J’ai eu la chance de partir à Cadix. J’avais envie de relever ce défi même si je suis quelqu’un qui n’aime pas quitter le nid familial. Le départ et la séparation ont été vraiment très compliqués mais une fois dans l’avion je n’avais « plus le choix », il fallait que j’avance. Finalement, ça a été la plus belle expérience de mes études. J’ai rencontré des personnes extraordinaires et ce stage m’a permis de prendre de l’assurance. Les Espagnols ne vivent pas comme nous. Pas de stress, pas besoin de courir pour réaliser des choses, là-bas tout se fait calmement. Les horaires sont différents de chez nous et je les trouve beaucoup plus adaptés. En Andalousie, c’est 9h -14h avec une pause de 30 minutes vers 11h. Chez nous, les horaires sont beaucoup plus lourds, arriver à 8h15 dans la cour pour surveiller les élèves, terminer à 15h30 avec parfois une surveillance jusque 15h45… Donc voilà c’est très différent.

Par contre, il faut être flexible car tout ne se passe pas toujours comme prévu et comme on l’a dit avec madame Scaillet et avec les filles qui sont parties avec moi : c’est l’ « adaptación » ( accent espagnol). Il faut s’adapter, il ne faut pas avoir peur. Moi, cela me faisait très peur mais le fait d’être entourée de copines et de ma pédagogue ben voilà, ça s’est passé comme sur des roulettes et je ne demande qu’à y retourner.

M : Et enfin, as-tu une devise?

Je n’ai pas de devise mais j’essaie toujours de faire au mieux ce que j’entreprends.